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Rencontre avec le DJ producteur JABLY

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Jalil Bourekba, alias Jably est un DJ-producteur marocain dont le sens du partage est tel qu’il a aujourd’hui créé la première plateforme d’enseignement de musique électro au Maroc. Rencontre avec cet artiste, passionné de musique électronique.

Peux-tu nous parler de ton parcours ?

Je suis Jalib Bourekba, DJ producteur aujourd’hui et tuteur de musique électronique et DJing. Je suis né à Fès le 29 juillet 1978, puis un peu plus tard, mes parents ont déménagé à Casablanca et c’est là où j’ai grandi. Depuis mon jeune âge, j’ai toujours été fasciné par les sons, les bruits… J’avais constamment cette question en tête : comment cela a été fait ? Petit à petit, j’ai commencé à le découvrir. Pourtant à l’époque c’était un peu difficile puisque nous n’avions pas internet, l’accès à l’information sur ces sujets était compliqué. Soit on tombait sur des magazines, soit sur des livres qui venaient de l’étranger sur la musique. Un peu plus tard, on a eu accès à des chaînes internationales à savoir Viva ou MTV, qui nous ont permis de découvrir les concerts et les festivals. A l’âge de 14 ans, j’avais une autre passion, l’électronique et la technologie ! Mon père m’apprenait à faire des compositions électroniques, à réaliser des schémas électroniques, des jeux de lumières ou des multivibrateurs qui produisaient des sons un peu bizarres. Ainsi, avec toutes les questions que j’avais en tête et cherchant les réponses à ces questions, je suis tombé dans la passion du sound design. Ayant aussi la vision et la volonté de vouloir créer des sons qui n’existaient pas facilement dans la nature mais qui devait être développés à travers des machines, des synthétiseurs ou des séquenceurs, j’ai décidé de devenir compositeur de musique et designer sonore.

Raconte-nous tes débuts dans la production de musique ?

Il y avait un DJ dans le quartier avec lequel j’ai passé beaucoup de temps lorsque j’avais 14 ans. Avec lui, j’ai découvert les vinyles et le matériel sonore. N’ayant pas accès à ces dispositifs à l’époque, il m’a initié au sound design. Au début, j’étais davantage Dj que producteur, puis je me suis dit que j’allais être producteur, puis devenir Dj. Cette confusion m’a même amené à tout arrêter à un certain moment.

Quels ont été les obstacles auxquels tu as dû faire face lors de tes débuts ?

A l’époque, être DJ était mal vu par la société et par la famille, puisque ce n’était pas considéré comme un « vrai » métier. Personnellement, je subissais une pression familiale pour choisir une carrière dite « sérieuse » et c’est en 1999 que j’ai tout arrêté. 10 ans après, j’ai repris le DJing, j’ai mixé dans quelques endroits, mais à vrai dire je ne le faisais pas bien. De plus, c’était un peu compliqué car je cherchais à collaborer avec des DJ producteurs locaux pour avoir un petit coup de main, mais ce n’était pas du tout facile de faire sa place et encore une fois, j’ai tout lâché.

Si tu devais t’identifier à un genre musical lequel choisirais-tu et pourquoi ?

La vérité je ne m’identifie à aucun genre. Pourtant ce qui m’influence le plus, c’est plutôt le Jazz et spécifiquement le Jazz expérimental. Ce genre musical emploie beaucoup de sonorités électroniques et expérimentales qui ne sont pas du tout communes. Ceci dit, le fait de créer des sons que l’on n’a jamais entendu est la chose qui m’inspire le plus.

Quel parcours - le producteur ou le DJ - est le plus important pour toi aujourd'hui ?

Aujourd’hui, le parcours DJ-Producteur est un seul parcours pour moi. J’ai également un deuxième parcours qui est celui d’instructeur, à travers une plateforme qui permet de découvrir la culture DJ et apprendre à créer de la musique assistée par ordinateur et par machine. Le DJ-producteur pour moi est un parcours complémentaire. Lorsque je fais une performance live, c’est-à-dire quand je joue ma musique, j’y trouve une grande liberté d’improvisation, ce qui me plaît particulièrement.

Qu'est-ce qui t’inspire et te pousse à continuer à produire de la musique ?

Sincèrement, tout m’inspire pour créer de la musique. Parfois ce peut être un bruit d’oiseaux ou de machine. Ce qui m’intéresse le plus dans cette création, c’est le fait de pouvoir m’exprimer et partager mes créations avec d’autres personnes ayant différentes perceptions. En créant un produit artistique, on raconte une histoire, et je raconte toujours mes histoires à travers mes productions. De ce fait, cette envie de créer et de mélanger des sons qui, normalement ne devraient pas être mixés, mais aussi de trouver une façon qui les rend homogènes, me rend extrêmement heureux et satisfait de moi-même. C’est une chose que je continuerai toujours à faire.

Si tu devais choisir un seul track à écouter en boucle, lequel choisirais-tu ?

Je n’écoute jamais un track en boucle. Peut-être l’écouterai-je quelques jours plus tard, attentivement pour le comprendre, mais jamais en boucle. Par contre mes propres productions, je les écoute en boucle, mais là c’est dans le but de corriger les petites erreurs dans un premier temps et d’améliorer ma production en décidant quoi enlever ou ajouter, dans un second temps.

Comment vois-tu l’évolution de la scène électronique marocaine ?

La scène électronique marocaine est toujours à son stade élémentaire. Certes, on a beaucoup plus de festivals et de collectifs, mais il manque beaucoup de choses, d’ailleurs on ne possède pas de vrais supports. Les consommateurs de ce genre de musique sont en communauté restreinte, il est vrai que c’est en train de bouger un peu, mais on manque de culture et d’Histoire. C’est de là que l’idée de créer un centre pour partager du savoir et l’historique de ce genre musical m’est venue. La scène électronique marocaine est donc toujours en phase de développement et malheureusement, la crise sanitaire actuelle a largement impacté cette scène à cause de l’annulation des évènements. On voit bien que les DJs et les producteurs marocains sont en arrêt. La situation est identique à l’étranger, j’avais eu une discussion avec un producteur  qui m’avait parlé des sons qu’il a créé mais qu’il n’utilisera jamais à cause de cette pandémie. En tout cas, j’espère que ça ira mieux dans le futur.

Tu as fondé la première plateforme d’enseignement de musique électro au Maroc, comment t'es venu l'idée de créer Make Noise Morocco ?

J’avais tout arrêté en 1999 pour me consacrer à mes études. Pourtant j’ai eu une petite chance, celle que mon cursus scolaire était orienté ingénierie réseau et télécom. Dans cette discipline, il y avait un module assez complexe, celui du traitement de signal. Lorsque j’ai obtenu mon diplôme, j’ai travaillé dans plusieurs postes et à un certain moment, j’avais même créé un petit business personnel. Pourtant, à chaque fois que j’arrivais à ce que je voulais, je finissais par tout lâcher sans m’en rendre compte. Cette situation a perduré jusqu’en 2017 où j’ai décidé de faire ce que j’aime, plutôt que de faire ce que les autres voulait, et ce que moi je voulais, c’était la musique. Dès que j’ai commencé, j’ai sorti mon premier album « Neptune Voice » qui a connu un certain succès, puis j’ai commencé à jouer live et c’est là que j’ai remarqué qu’il y avait beaucoup de jeunes qui essayaient de composer et qui m’envoyaient leurs sons. J’ai remarqué qu’ils manquaient de supports, ceux dont je manquais également quand j’étais jeune. C’est ainsi que l’idée m’est venue de partager mon savoir et mon expérience en traitement de signal, une matière que les ingénieurs de son étudient également dans leur parcours. Je me suis retrouvé avec une bonne maîtrise du sound design, des synthétiseurs et de tous les éléments dont on a besoin pour créer de la musique électronique. L’idée de créer Make Noise Morocco avait pour objectif de partager cette maîtrise avec ces jeunes et mettre en place une plateforme où les gens peuvent apprendre à suivre leur passion et l’exercer correctement. Make Noise Morocco existe depuis 3 ans et a déjà fait ses preuves. J’ai eu beaucoup d’étudiants qui ont excellé, certains ont même sorti un album avec un grand label, c’est une fierté pour moi de les avoir assistés.  

Des projets à venir ?

Pour l’instant tout est en stand-by à cause de la pandémie, à part l’école. J’essaie toujours d’entretenir ce projet. Quant à la production, le confinement m’a permis de créer plusieurs tracks que je sortirai dans les années à venir. En tout cas, le projet sur lequel je travaille toujours est Make Noise Morocco. De plus, j’ai décidé de sortir un nouveau track chaque semaine sur la plateforme Bandcamp.

Un dernier message que tu souhaites adresser aux jeunes souhaitant entamer une carrière dans la musique électro ?

Mon message n’est pas seulement adressé aux jeunes souhaitant faire de la musique électronique mais pour tous les jeunes : dans la vie, il faut faire ce que l’on aime réellement. A un moment donné, il faut se poser la question « qu’est-ce que j’aimerai faire ?» et il faut le faire quoi qu’il en soit, malgré les obstacles familiaux ou sociaux. Aujourd’hui, ma musique est partagée partout dans le monde et jouée par des Djs internationaux et c’est ce qui m’apporte une véritable satisfaction. Donc si vous l’aimez, faites-le !

On vous laisse découvrir quelques pépites :

 

 

 

 

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