Quand la table des fêtes devient un labyrinthe émotionnel
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Les fêtes de fin d’année, souvent idéalisées comme des moments de joie et de partage, peuvent se transformer en un véritable parcours du combattant pour les personnes souffrant de troubles du comportement alimentaire (TCA). Entre abondance de nourriture, remarques sur le corps et injonctions contradictoires, la table des fêtes devient un terrain d’angoisse où se mêlent culpabilité et pression sociale. Mais comment naviguer ce champ de tensions invisibles tout en préservant son équilibre psychologique ?
L’impact des fêtes sur les troubles alimentaires : un cocktail explosif
Les troubles du comportement alimentaire, tels que l’anorexie, la boulimie ou l’hyperphagie, se caractérisent par une relation complexe et souvent conflictuelle avec la nourriture, le corps et le contrôle. Les fêtes, avec leurs repas opulents et leurs rituels familiaux, exacerbent ces tensions en bouleversant les routines et en imposant un cadre où la nourriture devient omniprésente.
« Les fêtes concentrent plusieurs facteurs de stress : l’abondance des plats, la pression sociale lors des repas en groupe, les changements d’horaires et les remarques sur le poids ou l’apparence », explique une psychologue spécialisée en TCA. Les discours contradictoires « Fais-toi plaisir ! », « Attention aux kilos en trop ! » accentuent cette confusion, plongeant les personnes concernées dans un tourbillon d’émotions contradictoires.
Pour celles et ceux qui souffrent de TCA, manger en public est déjà une épreuve. Pendant les fêtes, l’exposition prolongée à table devient une véritable source de panique, renforçant le sentiment d’être « jugé » ou d’échouer à respecter des normes sociales implicites.
Anticiper les fêtes : une préparation émotionnelle essentielle
Face à ces défis, les spécialistes insistent sur l’importance de l’anticipation, non pas pour tout contrôler, mais pour aménager un cadre plus sécurisant. L’objectif est de réduire l’angoisse et de retrouver une forme de maîtrise, sans tomber dans le piège du perfectionnisme.
Quelques stratégies pour mieux vivre les repas de fête :
1- Discuter du menu à l’avance : En s’assurant que des plats rassurants ou « sécures » soient inclus, les personnes concernées peuvent éviter le sentiment d’imprévisibilité.
2- Privilégier des options modulables : Proposer des sauces à part, des portions ajustables ou des alternatives plus légères peut limiter le sentiment d’excès.
3- Clarifier ses limites avec un proche de confiance : Savoir que quelqu’un est présent pour intervenir en cas de remarques déplacées peut offrir un apaisement significatif. Poser ses limites : la clé d’un Noël serein
La période des fêtes peut rapidement se transformer en « tribunal social », où les choix alimentaires, l’apparence et les comportements deviennent des sujets de commentaire. Pour les personnes souffrant de TCA, chaque remarque, même bien intentionnée, peut être perçue comme une micro-agression. D’où l’importance, soulignée par les thérapeutes, d’apprendre à poser des limites.
Refuser de commenter son poids ou ses portions, écourter sa présence à table en cas de malaise ou s’accorder des pauses loin des regards critiques sont autant de gestes essentiels pour préserver sa santé mentale. Protéger son équilibre psychologique n’est pas un acte égoïste, mais une nécessité souvent rappelée par les associations spécialisées.
Déjouer le cycle festin–privation
Un des pièges récurrents des fêtes est le cycle festin–privation : se restreindre avant Noël, se « lâcher » le jour J, puis compenser par des régimes ou du sport excessif. Ce schéma, bien que courant, alimente les troubles alimentaires et entretient une relation malsaine avec la nourriture.
Pour briser ce cercle vicieux, les experts recommandent :
- Maintenir une alimentation régulière avant et après les fêtes, sans chercher à compenser.
- Privilégier une activité physique agréable, non comme une punition calorique, mais comme un moment de bien-être.
- Accepter l’imperfection : Quelques repas plus riches ne définissent ni la santé, ni la valeur personnelle.
Redéfinir l’essence des fêtes : au-delà de la table
Dans un contexte où Noël est perçu comme une période particulièrement stressante pour une partie croissante de la population, de nombreuses voix plaident pour recentrer les fêtes sur ce qui importe réellement : les liens humains. Les repas, bien qu’importants, ne devraient pas devenir l’unique focus de cette période.
Concrètement, cela peut passer par :
- Multiplier les activités non centrées sur la nourriture : jeux de société, balades, films ou simples moments de discussion.
- Simplifier les rituels familiaux : Alléger le poids des traditions peut permettre à chacun de vivre les fêtes avec plus de sérénité.
- Se concentrer sur la qualité des instants partagés : Un repas réussi ne se mesure ni en calories ni en photos parfaites, mais dans la chaleur des souvenirs qu’il crée. Une parenthèse pour le corps et l’esprit
En définitive, les fêtes n’ont pas vocation à devenir un test de contrôle alimentaire ou une source de stress insurmontable. Elles devraient être une parenthèse de chaleur, où le corps, l’esprit et les relations trouvent un terrain d’apaisement. Réapprendre à célébrer sans se détruire est un défi, mais aussi une opportunité : celle de transformer Noël en un moment de connexion authentique, loin des injonctions et des pressions. Un cadeau précieux, à offrir autant à soi-même qu’à ses proches.
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