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L'habit fait-il le moine ?

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Le vêtement a eu d’abord cette fonction de protéger le corps humain du froid, du soleil et des agressions extérieures. Néanmoins, il est très rapidement devenu « une seconde peau », comme le disait le couturier André Courrèges. Dans la vie quotidienne, nous interprétons tous les vêtements des personnes qu’on rencontre et à l’inverse, nous nous habillons en fonction des gens que l’on rencontre : nous ne portons pas les mêmes tenues pour aller au sport ou à un rendez-vous professionnel par exemple. Cette semaine, nous allons nous pencher sur la symbolique de l’habillement.

 

L’habit exprime de façon symbolique l’autorité et le prestige

Il existe une communication vestimentaire, au même titre que la communication non-verbale. Premièrement, la coutume veut que l’homme et la femme portent des vêtements qui les distinguent (jupe et robe pour le sexe féminin, short et pantalon pour le sexe masculin), les fêtes et les cérémonies exigent d’autres tenues que celles portées d’ordinaire, certains métiers imposent un uniforme, d’autres interdisent certains articles… Si certaines de ces « règles » peuvent être contraignantes, d’autres y voient l’occasion de susciter l’admiration (un lycéen qui choisit soigneusement sa tenue de rentrée scolaire) ou l’ironie (une femme chef de chantier qui vient avec des talons).

Les normes sociales qui règlementent le port du vêtement sont loin d’être toutes contraignantes au même degré. La mode en est le parfait exemple. Et qu’est-ce que la mode ? C’est le fait d’attirer l’attention et de donner du pouvoir à un groupe de vêtements, en fonction de la coupe, de la matière ou du coloris. La personne qui porte donc des vêtements à la mode, détient en quelques sortes une partie de ce pouvoir. Sauf que ce dernier est éphémère et se transfère d’une saison à l’autre, à un autre groupe de vêtements. Il faut donc renouveler sa garde-robe pour continuer à bénéficier de ce pouvoir.

Sauf que, tout le monde ne suit pas la mode. Certains préfèrent investir dans des pièces intemporelles, d’autres investissent dans certaines marques synonymes de prestige (Rolex ou Chanel par exemple). Tous ces comportements prouvent que le vêtement est un apparat et un marqueur social fort (un ouvrier ne s’habillent pas de la même manière qu’un cadre).

Sauf que, certaines personnes considèrent que vêtement est loin d’avoir une fonction symbolique et refusent de se conformer à la norme sociale qui dicte que l’on s’habille en fonction de qui on est. Bill Gates et Mark Zuckerberg illustrent parfaitement ce courant de pensée avec leurs tenues sobres malgré leurs revenus mirobolant. Si leurs visages et leurs fortunes n’étaient pas publics, il serait facile de les prendre pour un homme de la classe moyenne pour Bill Gates et pour un jeune qui commence sa vie pour Mark Zuckerberg.

Les apparences sont trompeuses

Parfois, nous accordons malgré nous, trop de pouvoir aux vêtements et nous avons tendance à mettre de côté certaines personnes qui ne se vêtissent pas selon nos critères. Bien que nous ayons conscience de ce phénomène, le regard des autres continue de nous peser et de nous pousser à nous habiller d’une certaine manière : ça nous est tous arrivé de vouloir sortir en pyjama et de nous habiller par crainte du regard de l’autre. Comme le dit Nicolas Grimaldi « mon corps me raconte, me désigne », il « m’engage et me compromet auprès des autres, son simple aspect paraît à tous un témoignage ». Paraître, c’est comparaître. Le regard d’autrui est à la fois ce que je redoute par-dessus tout et ce dont j’ai le plus grand désir.

Frédéric Godart, sociologue et professeur à l’INSEAD, qui a écrit une “Sociologie de la mode” explique que le vêtement a été historiquement condamné. Pour Platon, le vêtement est l’expression d’une certaine vanité. Ce qui est important, c’est la pensée. Le vêtement est considéré comme un épiphénomène et Platon ajoute même que le vêtement conduit au conflit car pour avoir accès aux ressources (NdlR : aux matières premières du luxe, aux belles choses), il faut faire la guerre.

« Sur le vêtement, il y a donc un contexte moral au départ. Quant à cette expression que “l’habit ne fait pas le moine”, elle est à rapprocher de la pensée de Saint-Thomas d’Aquin. Selon lui, on peut se cacher derrière le vêtement, on peut dissimuler son identité : le vêtement est un outil de mensonge, mais il peut aussi en dire long sur une personnalité individuelle. Ceux qui choisissent de belles étoffes et des bijoux voyants sont dans la projection d’un certain statut social – ce qui nous porte à conclure sur les priorités de l’individu en question. »

Donc les vêtements sont aussi une façon de se projeter dans la société : en fonction des marques que l’on porte et des styles que l’on arbore, qui sont très souvent des indicateurs de statut social.

La parure, comme elle est considérée comme étant une expression de l’individualité, on va se figurer que cela correspond à la personne dans son ensemble. C’est une forme de contamination psychologique. Et donc l’habit fait le moine : image extérieure et intériorité semblent pieds et poings liés. A l’extrême, certains vont faire de l’habit leur positionnement statutaire voire politique, et voici comment le vêtement devient militant. On pense notamment aux punks et skinheads qui se distinguent en malmenant l’habit conventionnel.

 

Le vêtement est donc un symbole.

Par définition, un symbole renvoie à autre chose que lui-même. Picasso a dessiné une colombe représentant la paix. Cette colombe n’est pas la paix elle-même, elle ne fait que la signaler ; on ne saurait la confondre avec ce dont elle est le symbole.

Nous comprenons bien déjà que l'habit définit une fonction, un rôle pour la personne : policier, travailleur, le pompier ou l'écolier à un moment précis, dans un endroit donné, et ce, en fonction du vêtement porté.

Mais l'habit définit-il la pensée, les motivations, les idées ou encore les intentions des personnes ? Un ouvrier qui porte la salopette est-il forcément en accord avec les intentions ou les orientations de son employeur quand il porte l'habit ? Un policier est-il neutre émotionnellement et intellectuellement quand il porte l'uniforme, comme lui demande sa fonction ou son rôle ? Une mini-jupe définit-elle forcément la prostituée ?

 

 

L'habit n'efface pas ce que vous êtes intrinsèquement. Un voleur reste un voleur, un sexiste demeure sexiste, un menteur est un menteur... peu importe l'ustensile vestimentaire utilisé. Le vêtement n'est qu'un outil permettant de donner une image mentale aux gens.

L'habit ne définit pas donc pas totalement la personne en face de nous. Nous ne devrions pas juger sur l'apparence, mais sur l'intention de la personne. L’habit ne fait pas le moine. Cette phrase, nous devrions l'avoir en tête constamment. Nous devrions demeurer prudents dans nos actes, nos pensées et nos jugements. Faire preuve de discernement est d'une importance primordiale dans la vie de tous les jours.

Ne préfériez-vous pas un juge sans sa toge jugeant des crimes avec justice qu'un juge bien vêtu vous jugeant injustement ?

Avant de juger justement, essayons de comprendre et connaître. Ne jugeons pas sur l'apparence, mais sur le fond. Privilégions le fond à la forme même si, à notre époque, cela semble difficile.

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